Système basilidien. Du nom de Basilidès, fondateur de l'une des sectes gnostiques les plus philosophiques. Clément d'Alexandrie parle de Basilidès, le Gnostique, comme d'un "philosophe consacré à la contemplation des choses divines". Alors qu'il prétendait que toutes ses doctrines lui venaient de l'apôtre Matthieu et de Pierre par l'intermédiaire de Glaucus, Irénée le vilipendait, et Tertullien fulminait contre lui, et les Pères de l'Eglise n'avaient pas de termes assez méprisants pour l' "hérétique".

Et pourtant sur l'autorité de Saint Jérôme lui-même qui décrit avec indignation ce qu'il avait trouvé dans la seule copie hébraïque authentique de l'évangile de Saint Matthieu (voir Isis Dévoilée II., 181[1].) qu'il avait obtenue des Nazaréens, la déclaration de Basilidès devient plus que digne de foi et si on l'acceptait cela résoudrait un problème important et embarrassant. Ses 24 volumes d'Interprétation des Evangiles furent brûlés, nous dit Eusèbe. Inutile de dire que ces évangiles n'étaient pas nos évangiles actuels. C'est ainsi que la vérité fut toujours écrasée.

(source : "Glossaire Théosophique" d'Héléna Blavatsky)


Mais qui, alors, étaient les premiers Chrétiens, demanderons-nous encore ? Ce furent incontestablement les Ebionites ; et en cela nous ne faisons que nous conformer à l'opinion des meilleurs critiques. "Il n'y a pas de doute que l'auteur [des Homélies de saint Clément] était un représentant du Gnosticisme Ebionite, qui avait été, en un temps la forme la plus pure du Christianisme primitif... Et qui étaient les Ebionites ? C'étaient les disciples et les partisans des Nazaréens primitifs, les Gnostiques cabalistes.

Le traducteur du Codex Nazaraeus dit, dans sa préface : "Que les Nazaréens n'aient pas non plus rejeté... (les Æons), c'est fort naturel, car ils furent les instructeurs des Ebionites, qui les admettaient (les Æons)."

Et voici, de plus, Epiphane, l'Homère chrétien des Hérésies, qui nous dit qu' "Ebion était de l'opinion des Nazaréens, la forme des Cérinthiens (qui supposent que le monde fut élaboré par les anges) et on leur donnait le nom de Chrétiens".

Cette appellation leur était certainement plus correctement appliquée qu'aux prétendus Chrétiens orthodoxes de l'école d'Irénée et de celle subséquente du Vatican. Renan nous fait voir que la secte des Ebionites réunissait dans son sein tous les parents survivants de Jésus. Jean-Baptiste, son cousin et précurseur, était le Sauveur accepté des Nazaréens, et leur Prophète.

Ses disciples habitaient l'autre rive du Jourdain, et l'auteur de Sôd the Son of the Man prouve clairement et péremptoirement que la scène du baptême du Jourdain se déroula sur l'emplacement du Culte d'Adonis.

"De l'autre côté du Jourdain, et au-delà du lac, habitaient les Nazaréens, une secte qu'on dit avoir déjà existé lors de la naissance de Jésus, et qui le comprit parmi ses membres. Ils doivent s'être étendus à l'est du Jourdain et au sud-est chez les Arabes (Galates, I, 17-21 ; II, 11) et les Sabéens, dans la direction de Bosra ; ils doivent encore s'être répandus par le Liban jusqu'à Antioche et au nord-est jusqu'à l'établissement Nazaréen de Berœa, où saint Jérôme les trouva. Il est possible que les Mystères d'Adonis prévalaient encore dans le désert ; dans les montagnes, le cri de Aiaï Adonaï était commun."

"Ayant été en rapport (conjunctus) avec les Nazaréens, tout Ebionite enseignait aux autres sa propre hérésie, que le Christ était né de la semence d'un homme", écrit Epiphane.

S'il en est ainsi, il faut croire qu'ils en savaient plus long au sujet de leur prophète contemporain, qu'Epiphane qui vécut quatre cents ans plus tard. Théodoret, ainsi que nous l'avons fait voir d'autre part, décrit les Nazaréens comme des Juifs qui "vénèrent l'oint comme un homme juste", et acceptent l'Évangile dit "selon saint Pierre". Saint Jérôme trouve l'Évangile original, authentique, écrit en langue hébraïque par Matthieu, l'apôtre publicain, dans la bibliothèque réunie à Césarée par le martyr Pamphile. "Les Nazaréens de Berœa en Syrie, qui se servent de cet Évangile, me donnèrent la permission de le traduire", écrit-il vers la fin du IVème siècle[2]. Et saint Jérôme ajoute : "Dans l'Évangile dont se servent les Nazaréens et les Ebionites, que j'ai traduit dernièrement de l'hébreu en grec et que la plupart des personnes nomment le véritable Évangile de saint Matthieu, etc." [3]. Que les apôtres reçurent de Jésus une "doctrine secrète" et qu'il en enseigna une, c'est ce qui ressort des paroles suivantes de saint Jérôme, qui le confesse dans un moment d'inattention. Écrivant aux évêques Chromatius et Héliodore, il se plaint, disant : "Je suis chargé d'une tâche difficile, dès le moment que vos Grâces m'ont commandé cette traduction, que saint Matthieu lui-même, l'Apôtre et Évangéliste. NE VOULAIT PAS QU'IL FUT ÉCRIT OUVERTEMENT. Car s'il n'avait pas été SECRET, il [Matthieu] aurait ajouté à l'Evangile que ce qu'il avançait venait de lui ; mais il écrivit ce livre sous le couvert des caractères hébreux, de telle manière que ce livre, écrit en caractères hébreux et de sa propre main, pût être mis entre les mains des hommes les plus religieux, qui, de leur côté, au cours des siècles, le recevraient de ceux qui les avaient devancés. Mais ce livre ne fut jamais donné à qui que ce soit pour être transcrit, et son texte fut interprété d'une manière par les uns, et d'une autre par les autres" 407. Puis il ajoute à la même page : "Et il arriva que ce livre, ayant été publié par un disciple de Manès, nommé Séleucus, qui écrivit encore, de mauvaise foi, les Actes des Apôtres, dévoila des choses qui n'étaient pas faites pour édifier, mais bien pour détruire ; et ce livre fut approuvé par un Synode, que les oreilles de l'Église se refusèrent, avec raison, à écouter"[4]. Il admet, lui-même, que le livre qu'il affirme avoir été écrit de la main de Matthieu ; le livre, qui, malgré qu'il l'eût traduit deux fois, était presque inintelligible pour lui, était un arcane ou un secret. Malgré cela, Jérôme, très ingénument, taxe d'hérésies tous les commentaires, sauf le sien. Bien plus, Jérôme savait que cet Évangile originel de Matthieu enseignait la seule véritable doctrine du Christ, et qu'il était l'œuvre d'un Evangéliste qui avait été un des amis et compagnons de Jésus. II savait, en outre, que si un des deux Évangiles, l'hébreu en question ou le grec qui fait partie de nos Ecritures actuelles, était une falsification, et par cela-même une hérésie, ce n'était pas celui des Nazaréens ; et cependant, sachant tout cela, Jérôme s'acharne avec plus de zèle que jamais dans ses persécutions contre les "Hérétiques". Pourquoi ? Parce que l'accepter équivalait à prononcer la sentence de mort de l'Église établie. L'Evangile selon les Hébreux était trop connu comme ayant été le seul accepté pendant quatre siècles par les Chrétiens Juifs, les Nazaréens et les Ebionites. Et aucun de ceux-ci ne reconnaissait la divinité du Christ. Si les commentaires de Jérôme sur les Prophètes, sa célèbre Vulgate et d'autres ouvrages de polémique, sont tous aussi dignes de foi que cette version de l'Évangile selon saint Matthieu, nous avons là une véritable révélation divine !

(source : "Isis Dévoilée" d'Héléna Blavatsky, II, p.204)


Notes et références

  1. NDE : Isis Dévoilée, II, p.204 dans la version française, extrait reproduit dans cet article
  2. Saint Jérôme, De Viris illust., cap. 3. "II est à noter que tandis que tous les Pères de l'Église affirment que Matthieu écrivit en langue hébraïque, ils se servent tous du texte grec, comme la véritable écriture apostolique, sans mentionner la relation qui existait entre le Matthieu hébreu et notre Matthieu grec ! Il contenait de nombreuses et particulières additions qui manquent dans notre Évangile" (Olshausen, Nachweiss der Echtheit der sæmmflichen Sehriften des Neuen test., p. 35).
  3. Saint Jérôme : Comment. de Mathieu, liv. II, ch. XII, 13. Saint Jérôme ajoute qu'il était écrit en langage chaldéen, mais avec des caractères hébreux.
  4. Cela explique le rejet des œuvres de saint Justin Martyr, qui ne fit usage que de cet "Évangile selon les Hébreux", ce que fit probablement aussi Tite, son disciple. On se rend compte de la date tardive à laquelle la divinité du Christ fut pleinement établie, par le seul fait que, même au IVème siècle, Eusèbe ne dénonça pas ce livre comme apocryphe, mais le classa seulement au même rang que l'Apocalypse de saint Jean ; et Credner (Zur Gesch, des Kan., p. 120) montre Nicéphore l'insérant avec l'Apocalypse, dans sa "Stichométrie" dans les Antilegomena. Les Ebionistes, les véritables Chrétiens primitifs, rejetant tous les autres ouvrages apostoliques, ne faisaient usage que de cet Évangile (Adv. Haer., 1, 26, 2 ; Eusèbe, Ecel. Hist., III, 27) et les Ebionites, ainsi que le déclare Epiphane, croyaient fermement, avec les Nazaréens, que Jésus n'était qu'un homme, "né de la semence d'un homme". [Panarion, Hær, XXX, 3.]