Atmâ-Mâtrâsou

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Atma-Mâtrâsu ou Atma-Mâtrâsou, du sanscrit. Entrer dans les éléments du "Soi Unique" (voir la Doctrine Secrète, Vol. II, 40-41). Atmamâtra est l'atome spirituel par contraste avec l'atome différencié élémentaire ou molécule et s'y opposant.

(source : "Glossaire Théosophique" d'Héléna Blavatsky)

Passages référencés dans l'article

DS, II, 40

Si nous considérons les Lois de Manou, nous y trouvons le prototype de toutes ces idées. Bien que la plupart soient perdues, dans leur forme originale, pour le monde occidental, défigurées par des interpolations et des additions, elles n'en ont pas moins conservé assez de traces de leur ancien esprit, pour en indiquer le caractère.

"[Dissipant les ténèbres], le Seigneur existant par lui-même [[[Vishnou]], Nârâyana, etc.] se manifesta... [et] voulant produire des êtres de son corps [Essence], ne créa, d'abord, que l'eau seule. Dans cette eau il jeta de la semence. Cette semence devint un œuf d'or." [1]
D'où vient ce Seigneur existant par lui-même ? On l'appelle CECI et on le qualifie de "Ténèbres imperceptibles, sans qualités définies, indiscernables, inconnaissables, comme plongées dans un profond sommeil [2]. Ayant habité cet OEuf pendant toute une Année Divine, celui "que le monde appelle Brahmâ" [3] brise cet OEuf en deux, forme le ciel de sa partie supérieure et la terre de sa partie inférieure et du centre le firmament et "l'éternel emplacement des eaux[4]".

Mais, immédiatement après ces versets des Lois de Manou, il y a encore quelque chose de plus important pour nous, car cela corrobore absolument nos enseignements Esotériques. Du verset 14 au verset 36, l'évolution est donnée dans l'ordre que décrit la Philosophie Esotérique. Cela ne peut guère être contesté. Medhâtithi, lui-même, fils de Virasvâmin et auteur du commentaire intitulé le Manoubhâsya, qui date, selon les Orientalistes occidentaux, de l'an 1000 de notre ère, nous vient en aide, grâce aux remarques qu'il fait pour élucider la vérité. Il se montre, soit réticent, parce qu'il savait ce que l'on doit taire aux profanes, soit très embarrassé. Cependant le peu qu'il divulgue suffit à établir clairement le principe septénaire dans l'homme et dans la Nature.

Commençons par le Chapitre I des Ordonnances ou "Lois", après que le Seigneur existant par lui-même, le Logos non manifesté des "Ténèbres" Inconnues, se soit manifesté dans l'OEuf d'Or. C'est de cet OEuf, de

11. "Cela qui est la cause imperceptible [indifférenciée], éternelle, qui est et qui n'est pas, de Cela est issu ce Mâle qui est appelé dans le monde Brahmâ."

Ici, comme dans tous les systèmes philosophiques authentiques, nous trouvons même l' "OEuf", ou le Cercle, ou le Zéro, l'Infini Sans-Borne, désigné par le mot "Cela"[5] et Brahmâ, qui n'est que la première Unité, appelé le Dieu Mâle, c'est-à-dire le Principe fructifiant. C'est ou 10 (dix), la Décade. Sur le plan du Septénaire, c'est-à-dire sur notre Monde seulement, il est appelé Brahmâ. Sur celui de la Décade Unifiée, dans le royaume de la Réalité, ce Brahmâ mâle est une Illusion.

14. Du soi (Atmanah) il créa le Mental (manas), qui est et n'est pas ; et du Mental, l'Ego-ïsme [la Soi-Conscience] (a), le régent (b), le Seigneur" [6].

  1. a. Le Mental est Manas. Medhâtithi, le commentateur, fait observer ici avec raison que c'est juste le contraire et que cela prouve déjà l'existence d'interpolations et d'arrangements ; en effet, c'est Manas qui jaillit de l'Ahamkâra ou Soi-Conscience (universelle), de même que Manas, dans le microcosme, surgit de Mahat ou Mahâ-Bouddhi (Bouddhi dans l'homme). Manas est double. Comme le prouve Colebrooke dans sa traduction, "le Mental, servant pour les sens comme pour l'action, est un organe, par affinité, qui est analogue au reste [7]" ; par "le reste" on entend ici que Manas, notre Cinquième Principe (cinquième parce qu'on nommait le corps le premier, ce qui est contraire au véritable ordre philosophique), est en affinité à la fois avec Atmâ-Bouddhi, et avec les Quatre Principes inférieurs. C'est pourquoi nous enseignons, notamment, que Manas suit Atmâ-Bouddhi en Dévachan et que le Manas Inférieur, c'est-à-dire le résidu ou la lie de Manas, reste avec le Kâma-Roupa dans les Limbes, ou le Kâma-Loka, qui est la demeure des "Coques".
  1. b. Tel est le sens de Manas qui "est et qui n'est pas". Medhâtithi le traduit par "celui qui est conscient du Je", ou l'Ego, et non pas par "le régent", comme le font les orientalistes. C'est ainsi qu'ils traduisent aussi la shloka suivante :

16. "Ayant fait pénétrer les parties subtiles de ces six [le Grand Soi et les cinq organes des sens], d'une splendeur sans mesure dans les éléments du soi (âtmamâtrâsou), il créa aussi tous les êtres." [8].

Tandis que, d'après Medhâtithi, on devrait lire mâtrâbhih au lieu de âtmamâtrâsou et traduire ainsi :

"Lui, ayant pénétré les parties subtiles de ces six d'un éclat démesuré, par des éléments de soi, créa tous les êtres."

Cette dernière traduction doit être la seule correcte, puisque Lui, le Soi, est ce que nous appelons Atmâ et constitue ainsi le septième principe, la synthèse des "six". Telle est aussi l'opinion de l'éditeur du Mânava Dharma Shâstra, qui paraît être entré, par intuition, beaucoup plus avant dans l'esprit de la philosophie que ne l'a fait le traducteur des "Ordonnances de Manou", feu le docteur Burnell ; il n'hésite guère, en effet, entre le texte de Kullûka Bhatta et le commentaire de Medhâtithi. Rejetant les tanmâtras, ou éléments subtils, et l'âtmamâtrasou de Kullûka Bhatta, il dit, en appliquant les principes au Soi Cosmique :

"Les six paraissent être plutôt le manas plus les cinq premiers principes de l'éther, de l'air, du feu, de l'eau et de la terre ; ayant uni cinq de ces six parties avec l'élément spirituel [le septième], il créa (ainsi) toutes les choses qui existent ;... âtmamâtra est par conséquent l'atome spirituel, par opposition à l'atome élémentaire et non pas la réflexion des "éléments de lui-même".

Il corrige ainsi la traduction du verset 17 :

"Comme les éléments subtils des formes corporelles de cet Unique, dépendent de ces six, il en résulte que les sages appellent sa forme Sharîra."

Et il ajoute que "éléments" signifie ici portions, ou parties (ou principes), interprétation appuyée par le verset 19 qui dit :

"Cet (Univers) non-éternel sort donc de l'Eternel, au moyen des éléments subtils des formes de ces sept Principes très glorieux (Pourousha)."

En commentant cet amendement de Medhâtithi, l'éditeur fait remarquer que "l'on entend probablement par-là les cinq éléments plus le mental [Manas] et la soi-conscience [Ahamkara] [9], les "éléments subtils" [signifiant], comme auparavant, "les parties fines de la forme [ou principes]". Le verset 20 le montre en disant de ces cinq éléments, "ou parties fines de la forme" (Roupa avec l'addition de Manas et de la Soi-Conscience) qu'ils constituent les "Sept Pourousha" ou Principes, appelés dans les Pourânas les "Sept Prakritis".

En outre, ces "cinq éléments", ou "parties fines" sont décrits dans le verset 27 comme "ceux que l'on appelle les parties atomiques destructibles", et, dès lors, "distinctes des atomes du Nyâya".

Ce Brahmâ créateur, qui sort de l'OEuf d'Or du Monde, réunit en lui-même les principes mâle et femelle. Il est, en un mot, le même que tous les Protologoï créateurs. De Brahmâ, cependant, on n'aurait pu dire, comme de Dionysos, "πρωτόγονον διφυη̃ τρίγονον Βακχει̃ον ̃Ανακτα ̉΄Αγριον άρρητὸν κρύφιον δικέρωτα δίμορφον" [qu'il est "premier-né, bisexué, d'aspect triple, Seigneur Bachique sans contrainte, saint, à ne pas mentionner ouvertement, bicornu et double" ] – un Jéhovan lunaire, un vrai Bacchus, avec David dansant nu devant son symbole dans l'arche – car il n'a jamais été établi de Dionysiaques licencieuses en son nom, ou en son honneur. Tout culte public de ce genre était exotérique et les grands symboles universels étaient partout défigurés, comme ceux de Krishna le sont maintenant par les Vallabâchâryas de Bombay, les sectateurs du Dieu enfant. Mais ces dieux populaires sont-ils la vraie Divinité ? Sont-ils le sommet et la synthèse de la Septuple Création, y compris celle de l'homme ? C'est impossible ! Chacun d'eux et tous sont des degrés de cette échelle septénaire de Conscience Divine, qu'elle soit Païenne, ou Chrétienne. On dit que Ain Soph se manifeste par les Sept Lettres du nom de Jéhovah qui, ayant usurpé la place de l'Inconnu sans Limites, fut doté par ses adorateurs des Sept Anges de la Présence – en réalité ses Sept Principes. On en parle pourtant dans presque chaque école. Dans la pure philosophie Sânkhya, Mahat, Ahamkâra et les cinq tanmâtras sont appelés les Sept Prakritis, ou Natures et sont énumérés depuis Mahâ-Bouddhi, ou Mahat, jusqu'à la Terre [10].

(source : "La Doctrine Secrète" d'Héléna Blavatsky, II, pp.39-42)

Notes et références

  1. Les Lois de Manou, I, V, 6-9. Voir traduction A.C. Burnell.
  2. Op. cit., V, 5.
  3. Op. cit., V, 11.
  4. Op. cit., V (13), traduction anglaise de Burnell. Voir aussi les traductions françaises de Loiseleur et de Pauthier, dans les Livres sacrés de l'Orient, par G. Pauthier, Paris, Abel Pilon, 1875, p. 333.
  5. Le sommet idéal du Triangle de Pythagore.
  6. Traduction Pauthier, p. 334.
  7. Voir la traduction de A. Coke Burnell, éditée par Ed. W. Hopkins, Ph. D.
  8. Traduction Pauthier, p. 33. – La traduction littérale de la traduction de Burnell est assez différente ; nous la reproduisons ici : 16. "Lui aussi, ayant donné aux parties subtiles de ces six (le grand Moi et les cinq organes des sens) un éclat démesuré, pour entrer dans les éléments du soi (âtmamâtrâsou), créa tous les êtres." (NAT.)
  9. Ahamkâra, en qualité de Soi-Conscience Universelle, a un triple aspect, de même que Manas. Car cette "conception du Je", ou de l'Ego, est ou sattva "tranquillité pure" ou apparaît comme rajas "actif", ou reste tamas "inactif" dans l'obscurité. Elle appartient au Ciel et à la Terre et prend les caractéristiques de l'Ether.
  10. Voir Sânkhya Kârikà, III et les Commentaires. (Voir traduction française des Essais sur la Philosophie des Hindous, par Pauthier. N.d.T.)